Quatre artistes vancouvérois dans un projet pancanadien

Après une période de création et de répétitions, “Un.Deux.Trois.”, la grande fresque identitaire qui rassemble 36 artistes de la francophonie-canadienne, est en tournée dans 9 villes et théâtres du pays. À l’affiche de ce spectacle-événement, quatre vancouvérois·e·s: France Perras, Anaïs Pellin, Cory Haas et Anais West. Ces créateur·rice·s nous partagent leurs impressions, surprises et enthousiasme quant à ce projet artistique à grande échelle.

Comment définiriez-vous Un.Deux.Trois. en quelques mots? C’est quoi pour vous?

Anais West: Un.Deux.Trois. est une cacophonie chaotique, bruyante et théâtrale. C’est une éviscération intense et implacable de ce que signifie être francophone dans le soi-disant « Canada », et de ce que signifie essayer de former une communauté.

Cory Haas: Un délire théâtral. Une virée épique qui aborde des questions d’identité, au sens large; une folie francophone canadienne. C’est trois pièces de Mani Soleymanlou qui culminent avec Trois et ses 36 artistes sur scène.

France Perras: C’est du jamais vu. Une expérience théâtrale à ne pas manquer. C’est une opportunité de se retrouver avec des artistes éblouissants, venus des quatre coins du pays. Pour moi, c’est la chance de me retrouver et de partager avec mes confrères et consœurs.

Anaïs Pellin: Une fresque identitaire pancanadienne surréaliste et audacieuse, un ovni théâtral incroyablement divertissant et profond.

Qu’est-ce qui vous a le plus surpris·e au cours du processus créatif avec près de 40 autres artistes?

Cory Haas: La facilité et la joie dans lesquelles s’est passé le processus. Malgré des thématiques complexes qui peuvent rapidement tourner à l’engueulade (ce qui est arrivé), nous sommes tou·te·s là au service du projet. Certaines de ces disputes font partie du spectacle, mais l’humour et la bienveillance de ce groupe d’artistes continuent de me surprendre. J’ai maintenant 35 nouveaux amis que j’admire énormément.

France Perras: Que nos réalités ne se ressemblent pas vraiment. Et en même temps nous sommes tou·te·s des êtres humains. Et c’est ça qui nous rassemble.

Anaïs Pellin: La possibilité que chacun·e soit entendu·e. L’écoute et la démocratisation du processus.

Anais West: J’ai été surpris·e par les querelles, les complexités et les multiplicités entre les communautés francophones. Je pense que les anglophones ont tendance à considérer les Franco-Canadiens comme un monolithe et à ne pas connaître grand-chose de l’histoire au-delà du Québec.

Qu’est-ce qui vous a paru le plus stimulant dans cette création? Et le plus difficile?

France Perras: J’ai compris très tôt que ce n’était pas à mon sujet, que je devais vraiment me mettre de côté pour faire partie du collectif. Je devais laisser mon ego à la porte, et ce fut la partie la plus stimulante pour moi. C’est rafraîchissant! J’avais juste besoin d’être présente.

Anaïs Pellin: La même réponse pour les deux questions: de créer avec 36 individus ayant chacun une réalité très distincte et de trouver sa place dans ce processus artistique.

Cory Haas: Le plus stimulant, c’est l’expérience de ce spectacle, nous sommes au théâtre pendant 4 heures 30. En tant qu’artistes, nous y sommes pendant 6 heures tous les jours et c’est stimulant d’être autant impliqué dans cet événement théâtral. De plus, d’entendre les voix de ces artistes, même si tout de ce qui a été dit en création n’a pas été gardé sur scène, d’apprendre les réalités de tou·te·s a été une belle découverte. Le plus difficile a été les conversations déplaisantes, même parfois inconfortables, qui ont eu lieu pendant le processus, mais c’est grâce à celles-ci que cette expérience est complètement humaine.

Anais West: Tout au long du processus, Mani nous a encouragé·e·s à développer nos propres personnages et à avoir une approche créative vis-à-vis des mots que nous avons prononcés. Nous avons créé des caricatures théâtrales de nous-mêmes et c’était à la fois stimulant et incroyablement difficile.

Qu’est-ce qui est différent au niveau de votre interprétation en tant que comédien·ne par rapport aux pièces dans lesquelles vous jouez habituellement?

Anaïs Pellin: Je joue une caricature de moi-même, ce que je n’avais jamais joué auparavant. Étrangement, c’est peut-être une des choses qui fut la plus complexe pour moi au niveau de l’interprétation dans le processus créatif et qui est maintenant la plus stimulante depuis que nous avons commencé à répéter le texte à peu près final et à le jouer devant une audience.

France Perras: C’est moi. Ce n’est pas un personnage. Ou, devrais-je dire, c’est un stéréotype de moi-même… Vous verrez! Un autre élément, c’est que je ne dis rien. J’ai deux répliques dans le spectacle. Celles et ceux qui m’ont déjà vue sur scène, jaser continuellement, vont être surpris·e·s de mon silence! C’est un exercice magique d’écouter, pour un·e comédien·ne, et d’être dans le moment, simplement être présente sur scène, sans rien dire.

Anais West: En tant qu’anglophone, je n’ai jamais fait partie d’une pièce où je devais créer, répéter, jouer et essentiellement vivre en français pendant deux mois et demi. L’immersion dans la langue et la culture a été totale, j’ai même commencé à penser et à rêver en français, chose qui ne s’était pas produite depuis que je suis enfant.

Cory Haas: Je joue une version un peu plus élevée de moi-même. C’est un niveau de jeu que j’aime beaucoup. Il y a une certaine distance dans le niveau de jeu qui permet beaucoup d’humour et parfois même de la malaisance. C’est aussi vulnérable et cela nous permet de nous rapprocher du public encore plus.

Un moment qui vous a profondément marqué·e au cours de la création, des répétitions et/ou des premières représentations?

Cory Haas: Parce que nous venons des quatre coins du pays et que nous représentons les villes/les réalités dans lesquelles nous jouons, chaque théâtre répond un peu différemment. C’est marquant d’entendre les réponses du public quant à cela. Par exemple, nous avons joué à Sudbury où l’université venait de fermer un nombre important de programmes francophones, et la réponse du public quand le sujet a été abordé était pleine d’émotion!

Anaïs Pellin: Le fait que nous nous soyons si vite plongé·e·s dans des débats extrêmement délicats après seulement 3 jours de répétitions; cela a créé une espèce d’alchimie dans le groupe. Nous sommes devenu·e·s une réelle troupe en seulement quelques semaines et je pense que cette proximité entre nous se reflète sur scène. Aussi, la réaction du public après les représentations; iels sont présents après plus de 4h de spectacle et souhaitent discuter avec les 36 acteur·rice·s, c’est très enthousiasmant!

Anais West: Mes conversations avec les autres artistes queer et particulièrement trans dans le spectacle ont été profondes – la lutte pour les droits trans et non binaires dans le monde francophone est entièrement différente, notamment en raison de la nature genrée de la langue.

France Perras: Toute la gang a été vraiment bouleversé par le processus. C’est un processus difficile à décrire, mais en quelques mots: tout ce qu’on dit sur scène, on l’a dit en création. Un genre de théâtre verbatim. Ce qui fait que ça peut-être très vulnérable, et j’ai eu le grand privilège de voir ces artistes se révéler, se prononcer, se dévoiler… quel cadeau immense! Je me compte si chanceuse.

Que diriez-vous au public vancouvérois pour l’inciter à participer à cet événement hors norme?

Anaïs Pellin: Vous ne verrez jamais un autre spectacle de ce type dans votre vie. Ne manquez pas de voir la francophonie théâtrale canadienne réunie sur scène, ça n’arrivera pas souvent!

France Perras: Encore une fois: c’est du jamais vu. 36 artistes de la francophonie canadienne sur scène. Venez découvrir le talent d’à travers le pays. Faites-vous le cadeau de vous faire confronter: vos biais, vos jugements, votre vision du monde… c’est à ne pas manquer! C’est garanti que même après 4h30 de spectacle, vous allez vouloir prendre un verre pour continuer la discussion!

Cory Haas: Un spectacle de cette envergure, c’est rare, surtout à Vancouver. C’est un événement théâtral unique en son genre – 3 pièces, presque 40 artistes sur scène. C’est un marathon vivace, qui en vaudra la peine quand vous en sortirez.

Anais West: Un.Deux.Trois. est sans doute l’une des expériences théâtrales les plus uniques que vous puissiez vivre dans votre vie. En termes de taille, d’ambition et de nombre de perspectives représentées sur scène. Le chœur de voix différentes dont vous serez les témoins est exaltant.

 


Un.Deux.Trois. sera présenté au Scotiabank Dance Centre à Vancouver les 11 et 12 novembre 2022. Ne manquez pas la chance de voir cette oeuvre exceptionnelle! Veuillez noter que le spectacle est d’une durée approximative de 4h30, incluant deux entractes. Plus d’informations et achat de billets sur la page du spectacle.

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